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"On peut être artiste sans être rien de particulier". M.D

11 mai 2010

Campbell's et compagnie

24239_2_Rétrospectivement, on perçoit dans ce processus une parenté à la logique commerciale : la bonne tenue d’un marché requiert un constant renouvellement des produits. Pour autant cela ne doit pas faire oublier la caution intellectuelle qu’il a reçue, qui l’a permis. L’intelligence commerciale a été secondée par l’intelligence théorisante sans laquelle aucune avant-garde artistique ne s’impose. Mais au vu du résultat artistique, il est permis il est permis d’estimer que l’intelligence des critiques d’art fut à la remorque d’une intelligence commerciale de haut vol.

Jean-Philippe Domecq,

Artistes sans art ?

Editions Esprit, Collection Agora, 1994.

Page 158.

            

La promotion d’Andy Warhol résume le tout. Warhol et Castelli vont se rendre mondialement célèbres l’un l’autre. Le produit de l’un est l’exact reflet de la technique commerciale de l’autre et réciproquement. C’est la rencontre de l’artiste de la consommation et du marchand de l’art de consommation. […]

Castelli ne s’y trompe pas, il ne devient le marchand de Warhol que le jour où il comprend que celui-ci va multiplier, multiplier les bouteilles de Coca-Cola, les figures de stars, les dollars, les boîtes de soupe et de lessive : « Si j’avais vu à ce moment-là la répétition, je me serais dit tout de suite qu’il y avait là quelque chose d’exceptionnel, de très original et de très nouveau. Parce que chez Warhol c’est une chose de base. Sans la répétition, Warhol n’est pas Warhol. » Répétition et accumulation comme valeurs esthétiques. Mais voici le discernement marchand : «  L’idée était évidemment d’indiquer par la répétition réelle ou possible que tout cela existait en centaines de milliers d’exemplaires, qu’on pouvait le trouver partout, n’importe où. »[1]

Jean-Philippe Domecq,

Artistes sans art ?

Editions Esprit, Collection Agora, 1994.

Pages 166-167.

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Ci-dessus: Andy Warhol, Ten Lizes, 1963. Huile et laque appliquées en sérigraphie sur toile. 201 x 564,5 cm.

Ah, Warhol, toujours celui-là ! Il semble aujourd’hui presque impossible de disserter sur les principes de l’art comme ceux de l’œuvre en passant à côté du travail de ce Businessman. En 1964, Andy Warhol ouvre les portes de ce célèbre atelier nommé Factory qui verra aussi bien naître les créations du pop art que les enregistrements des Velvet Underground. Mi-usine, mi-atelier, espace hybride de création, cette Factory est significative du travail sériel engagé par Warhol ainsi que du but commercial, marchand qu’il lui assigne.

Le principe même de la sérigraphie dont use l’artiste pop remet en cause cette idée d’unicité de l’œuvre d’art. Ce travail bouleverse d’autant plus les critères artistiques de l’époque car Warhol puise sa matière à produire directement à la source iconographique que peuvent représenter les Mass Media américains. Marilyn, Jackie, Basquiat ou Mao (et même la Joconde, décidément partout !) aucune star/célébrité de l’époque n’échappe à Andy. Ils sont tous consommables au même titre qu’une soupe Campbell’s. C’est le produit qui compte, la production. Il faut faire du chiffre ! C’est pourquoi Warhol s’engage dans un travail répétitif, d’accumulation. Si en travaillant plus on gagne plus alors il est certain qu’en produisant plus… on consomme plus et on gagne plus aussi ! Cette idée de la consommation - de l’œuvre et de la culture vues comme produits calibrés, qui affecte la société et le marché actuel – nous vient des Trente Glorieuses, du taylorisme et de toute cette époque qui a su faire naître en nous ce besoin continuel de combler notre manque de savoir et le vide qui nous anime par l’achat, bien trop souvent compulsif.

Keith Haring a su exploiter ce filon en créant sa propre boutique, le Pop Shop, où il vendait toute sorte de produits dérivés allant des chaussettes à l’imprimé jaune au bol à céréales, sans oublier bien sûr l’indispensable parapluie.

pop_shop_logo_1_ Si vous souhaitez profiter de tous ces gadgets, c’est par là : http://www.pop-shop.com/

Et puisqu’il y a marché, il y a aussi concurrence… vous avez aussi la possibilité d’acquérir une « véritable œuvre d’art » dans le Ben Baz’art, et ceci pour la modique somme de 50 €, à ce prix là c’est sûr que ce serait bête de s’en priver. C’est Adorno qui aurait aimé ça !

(Et enfin, pour ceux intéressés par Warhol, n’oubliez pas qu’il règne sur le rayon encadrement chez Ikéa).

[1] Claude Berri rencontre Leo Castelli.


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11 mai 2010

Lien vers You Tube

Le clip de la chanson "J'accuse" de Damien Saez peut être visionné via ce lien You Tube:

http://www.youtube.com/watch?v=oqaiH8iBZ5g

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Ci-contre:

Duane Hanson, 

Supermarket Lady Sculpture

1970

11 mai 2010

Toi, artiste?

Damien Saez sors un nouvel album : J’accuse !

Damien_Saez__J_accusedamien__2010Si vous n’avez jamais entendu le titre de cette chanson, vous avez certainement du en entendre parler. En effet, la photo de pochette de disque a été censurée dans les couloirs du métro parisien. On y voit une femme à peu près nue, affalée dans un caddie de supermarché.

Saez, ce chanteur « pas médiatisé » qui pourtant, depuis une dizaine d’année vend beaucoup de disques et rempli de grandes salles de concert, cet « artiste » engagé (vous souvenez-vous peut-être de sa chanson après le premier tour de des élections présidentielles de 2002) voire même enragé, il dénonce à travers ce nouvel album, le dictât de la société de consommation (d’où cette photo pour illustrer sa pochette de disque et ses affiches de concert) et des comportements moutonniers. Il n’hésite pas à employer généreusement le mot « con » qu’il attribut « aux autres », à tous les autres !

Une chanson, puant de prétention, un brin caricatural ? Un texte un peu simpliste ? Si toutefois son discours sur l’hyperconsommationhyperconsommation me semble vrai, j’y vois dans ce personnage un miroir de Jeff Koons. Ne dit-on pas d’ailleurs des chanteurs qu’ils sont des artistes ? Cette « voix » qui s’élève contre le système, provocante, outrancière et radicale utilise des mots simples, compréhensibles par tous voire même sortis d’un vocabulaire très familier.
Saez, un « artiste » ? Un provocateur, plutôt, qui traite le monde de cons (mais pas lui ! non, tous les autres !). A croire que le monde est vraiment « con » puisque tout le monde le considère comme l’un des meilleurs « artistes » de la scène française actuelle.

11 mai 2010

" Gagner de l'argent est un art, travailler est un art et faire de bonnes affaires est le plus bel art qui soit ". A. Warhol

Point commun entre les chefs-d’œuvre de Léonard de Vinci, de Duchamp ou encore de Warhol ? Toutes ces œuvres ont frappé les esprits à jamais. Toutefois, peut-on appliquer cette même conclusion au travail de Jeff Koons ? Artiste les plus médiatisés de la scène contemporaine actuelle, ses œuvres n’ont pas de visée culturelle, intellectuelle mais sont destinées à vendre une image, à faire un coup marketing et ainsi attirer les médias plutôt qu’à imposer une image. Il est le premier artiste contemporain à exposer au château de Versailles. Grosse polémique autour de cet événement qui a tout de même attiré un grand nombre de visiteurs. Pas moins de 960 000 personnes en quatre mois serait venu voir le travail très controversé de Koons dont notamment le célèbre Rabbit.

Ci-dessous:

Jeff Koons, Rabbit, 2007

Exposition au château de Versailles, 2008-2009

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Ce lapin de 104x30,5 cm en acier inoxydable devenu une vedette ! Dans ce sens où cette œuvre a fait parler d’elle, a acquis une certaine notoriété, un « statut de célébrité » dans le cadre de la culture de masse, il me semblerait donc judicieux de parler de chef-d’œuvre pour ce travail. Jeff Koons peut donc être fière de son Rabbit ! Un bon coup de marketing pour faire parler de son œuvre et se hisser au rang d’œuvre d’art.

En juin de la même année, à Londres, un Balloon Flower identique à celui de François Pinault exhibé à Versailles mais de couleur rose a raflée tous les records de vente : 25,8M$, enchère inégalée à ce jour !

D’autres artistes brillent dans ce domaine ! C’est avec toute la grâce que l’on connaît à l’artiste Ben Vautier que l’on doit cette fameuse citation : « L’art sert à cirer vos godasses ». Dure vie donc pour les futures artistes que celui de vous rendre beau ou du moins vos chaussures !

Ben Vautier ou l’Homme des mots, des mots, des mots, des maux ! Aïe, oui, ça fait mal ! L’angoisse du vide. Ses tableaux, je ne pense pas exagérer en disant cela, on a tous finit par s’en lasser. Vu, revu et re revu un peu partout dans les rues, les tableaux de Ben sont des toiles noires sur lesquelles sont inscrites, avec de la peinture blanche, de brèves citations de lui-même // b(u)y-self//. L’art doit être populaire. Il n’hésite donc pas à faire de ses œuvres des gadgets, comme avec sa vente-performance d’objets bon marché intitulée Bizart Baz’art. Sa philosophie : faire de l’art avec tout et n’importe quoi tant que l’artiste le décide ainsi.

L’œuvre d’art doit-elle toujours faire parler d’elle pour obtenir ce statut?

Ainsi, l’univers de l’art contemporain illustre de manière criante le triomphe du commercial, d’une société et d’une culture devenues marchés. A. Warhol déjà se considérait et se proclamait comme  business artist. L’époque n’est plus à la quête de gloire immortelle mais à la reconnaissance immédiate, à la recherche de la célébrité médiatique et du succès marchand. Les artistes deviennent « people » face aux scandales qu’ils suscitent.

Et si tout simplement moi aussi je devenais artiste ? Ne pouvons-nous pas tous devenir nos propres « peoples » ?


   

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   http://www.votreportrait.fr/?gclid=CLjv48DuyKECFRgsDgoddDPIdA


9 mai 2010

De Laura à R. Mutt

En réponse à l’article Laura c’est moi, j’aimerai à mon tour interroger plusieurs points et notamment celui en rapport à l’aura qui plane autour de l’artiste et non plus de l’œuvre.

La valeur marchande de l’art joue-t-elle un rôle dans la perception qu’on peut accorder à une œuvre ?

Est-ce la qualité du travail ou la signature qui prévaut pour déterminer la valeur accordée à une œuvre d’art et dans ce cas aussi le nom de l’artiste influe t’il pour définir si la production rentre ou non dans la catégorie de travail artistique ? Marcel Duchamp, là encore précurseur à travers sa réflexion, a su nous montrer à quel point la renommée de l’artiste influence la réception de sa production face au public.

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Les ready-made de Duchamp révèlent le fait que c’est non pas seulement « le regardeur qui fait l’œuvre » mais aussi la cote de l’artiste, sa médiatisation (Duchamp ajoutait d’ailleurs ; « plus la critique est hostile, plus l’artiste devrait être encouragé ». De cette façon la conception de Duchamp rejoint celle énoncé par Th. Adorno dans Théorie esthétique, 1970. Pour faire sa place dans l’Histoire, une œuvre doit dans un premier lieu révéler des difficultés à être comprise, sembler inaccessible au premier abord) ainsi que la critique qui fixent son montant et sa valeur.

Il suffit dès lors d’apposer sa signature sur un objet industriel manufacturé, d’être assez reconnu… et hop, l’œuvre est née ! Si Duchamp élaborait par ce biais la une nouvelle conception de l’art, certains artistes actuels ne reprennent ce principe (déjà vu et revu) que dans un but lucratif.

La Fontaine « réalisée » en 1917 par Marcel Duchamp est une œuvre majeure qui bouleverse un bon nombre des fondements de l’art.

Duchamp, père des artistes conceptuels, envisage l’œuvre d’art non comme l’ouvrage manuel de « l’artisan » mais conçoit plutôt qu’elle est le produit de la réflexion, définie comme causa mentale (l’idée était déjà présente dans l’art de la Renaissance et défendue par Léonard de Vinci qui souhaitait accorder à l’art toute son importance et élevé la peinture au rang des arts libéraux).

Le court extrait qui suit, montre de quelle façon est attribuée la valeur des œuvres, mais illustre aussi cet aspect mercantile qui anime le marché de l’art. En réalité, l’œuvre possède la valeur qu’on veut bien lui accorder. S’il est question de chef-d’œuvre – c’est à dire d’une pièce rare aux qualités immuables et dont l’inestimable valeur est pérenne – de quelle manière, suivant quels critères, est-on qualifié pour juger de son prix ?


           Pourquoi un De Kooning vaut-il 1 Raphaël + 1 Titien + 1 Greco + 1 Latour + 2 Véronèse + 2 dessins de Poussin ?

            On trouve cette équation dans la Review of the Season 1991 de chez Christie’s. Un tableau de De Kooning y est mis en vente pour la somme de 44 880 000 F. Le même catalogue propose un Raphaël à 8 688 000 F, un Titien à 5 765 200 F, un Latour à 4 995 000 F, un Greco à 12 106 920 F, un Véronèse à 6 050 000 et un autre à 5 476 000 F ; ce qui, si l’on ajoute deux dessins de Poussin cotés à 1 540 000 et 1 320 000 F, nous amène au total de 45 941 120 F.

Jean-Philippe Domecq,

Artistes sans art ?

Editions Esprit, Collection Agora, 1994.

Page 149.

Illustration ci-dessus:

Marcel Duchamp, Fontaine, 1917/1964.

Original réalisé en 1917 à New York, aujourd'hui perdu. Les copies ont été réalisées en 1964.

Faïence blanche recouverte de glaçure céramique et de peinture,

63  x 48 x 35 cm.


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8 mai 2010

Lancement de la campagne publicitaire

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8 mai 2010

Laura, c'est moi!

« Une compagnie se proposait récemment d’acheter "mon aura". Ils ne voulaient pas mon produit. Ils répétaient inlassablement : "Nous voulons votre aura". Je n’ai jamais trouvé ce qu’ils voulaient vraiment. Mais ils étaient prêts à payer très cher pour l’avoir. Alors je me suis dit que si quelqu’un était prêt à payer autant, je devais bien essayer de trouver ce que c’était. »

[Andy Warhol]

8 mai 2010

Je déclare la révolution industrielle COUPABLE !

Le chef-d’œuvre, « Œuvre majeure, parfaite dans son genre ». Prodige, bijou. Cette rareté témoignant d’une prouesse manuelle et intellectuelle qui confère à l’œuvre un caractère divin, une authenticité, c’est ainsi que Walter Benjamin baptisa cela l’ « aura ».

En effet, selon lui, cette « valeur auratique » est la capacité d’un chef-d’œuvre à traverser le temps. D’après un sondage exclusif (!) réalisé en ligne par Harris Interactive pour Beaux-Arts magazine (2009), 1000 français (!) confèrent, eux-aussi, le statut d’œuvre d’art à une œuvre avant tout selon son ancienneté supposée. Le gagnant de ce sondage est une antiquité égyptienne qui date de 2400 avant notre ère. Il s’agit de la Chapelle du mastaba d’Akhethétep. Puis arrive la tapisserie Les Chasses de Maximilien de Barend Van Orley, XVIe siècle, en passant par Sainte Marie-Madeleine de Gregor Erhart, 1510, le Violon d’Ingres de Man Ray, 1924 et pour finir, en 20ème et dernière position, New York City de Piet Mondrian, réalisé en 1942.

Je déclare la révolution industrielle COUPABLE !

La  reproductibilité, coupable de crime contre le chef-d’œuvre ? Ainsi, triste nouvelle que nous livre W. Benjamin dans son œuvre « L’œuvre d’art à l’époque de sa reproductibilité technique ». Selon lui, la « valeur auratique» d’une œuvre d’art se perd avec l’apparition de techniques modernes de reproduction qui ont, désormais, la capacité de mettre les œuvres du passé à la porté de tous. Ce passage de la « valeur culturelle » à la « valeur d’exposition », cette démocratisation de l’art entrainerait donc la perte de cet « aura ». Ambigüité?

Ne peut-on donc plus parler de chef-d’œuvre pour l’art moderne et l’art contemporain ?

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Vik Muniz, Monna Lisa, daprès Léonard de Vinci (Giordian Puzzles), 2009.

7 mai 2010

Le Centre Pompidou-Metz, c'est bientôt !

           centre_pompidou_c_est_bient_t La première exposition qui se déroulera au sein du Centre Pompidou de Metz sera consacré à (ré)interroger les critères qui font de l’œuvre un chef d’œuvre. Est-il encore aujourd’hui question de chef d’œuvre, un thème qui semble pas mal secouer la critique et remuer l’actualité artistique contemporaine.

Chef-d’œuvre ? s’articule autour de quatre temps forts et s’étend sur une majeure partie des salles d’expositions du centre d’art. Ainsi cette manifestation retrace l’histoire du chef-d’œuvre artistique au fil des siècles et des différents courants créatifs. Le spectateur est donc invité à déambuler à travers quatre espaces consacrés aux Chefs-d’œuvre dans l’histoire, aux Histoires de chefs-d’œuvre, Rêves de chefs-d’œuvre et enfin aux Chefs-d’œuvre à l’infini. Ce parcours se propose d’interroger la relation entre les œuvres, le public, les institutions dans lesquelles elles prennent place où encore leur rapport avec les procédés techniques permettant la reproductibilité.

La dernière partie de l’exposition consacrée à l’art contemporain souligne justement ce changement, cette évolution qu’a subie l’œuvre d’art au fil des années. Soumise aux nouvelles technologies, aux techniques numériques, à la vidéo, à la performance ou à tout autre genre de « non-art », l’œuvre peut-elle encore aujourd’hui répondre aux critères qui la qualifieraient de chef-d’œuvre ; possède t’elle encore cet aura dont parlait W. Benjamin ?

L’œuvre actuelle, soumise aux principes de reproductibilité, ayant perdu son unicité, peut être multipliée infiniment par le biais de la copie. Si la notion de chef-d’œuvre existe encore, semble t’il alors qu’il faudrait la chercher ailleurs qu’à travers son caractère unique et « auratique ».

            Toute l’analyse de Benjamin repose sur l’opposition, bien connue, rebattue et même trivialisée depuis son essai, entre l’œuvre « auratique », douée d’une aura unique et magique, de l’art du passé et l’œuvre fondamentalement reproductible de notre époque. […]

            Ce que la reproductibilité mécanique détruit, c’est l’aura : l’existence singulière et fragile, la contingence de l’œuvre au lieu où elle se trouve, une expérience simultanée du proche et du lointain de l’œuvre, de son authenticité dans une « localisation » unique. […]

            Le spectateur passe ainsi d’un monde où il se recueillait devant les œuvres pour se retrouver plongé en elles ou les faire entrer en lui, un monde de l’absorption dans les deux sens du terme, à un monde où il est distrait et manipulé par les images pour son plus grand plaisir : s’ouvre le temps de « la réception dans la distraction ». […]

            Au fond, le musée est la plus belle illustration du diagnostic de Benjamin, dans ce qu’il a de plus grinçant : il sauvegarde la valeur culturelle en la soumettant aux valeurs de l’exposition et de la publicité.

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Yves Michaud,

L’art à l’état gazeux, Essai sur le triomphe de l’esthétique,

Hachette Littératures, Editions Stock, 2003.

Pages 111-113-115-116-123.

            Cette première exposition – qui tente de comprendre ce qu’est advenu l’œuvre et en particulier celle qu’on qualifiait de chef-d’œuvre – se déroule au sein du nouveau Centre Pompidou de Metz qui ouvrira ces portes le 12 mai prochain. Mais, au constat de la publicité et des démarches mises en place pour la communication, des enjeux économiques véhiculés par cette manifestation mais aussi par l’ouverture du site culturel, il semblerait que l’art soit un « prétexte » à vendre de la culture conditionnée pour spectateurs ayant soif de connaissances.

C’est pourquoi, à l’issue de la visite – et pour ne pas rester sur leur fin/faim (car l’art contemporain serait parfois reconnu comme étant indigeste.), un restaurant ainsi qu’un bar invitent les regardeurs à étancher leur appétit culturel. Tout est donc dans ce mall de l’art[1], conçu afin de satisfaire les besoins du consommateur. Alors avis aux amateurs…d’art ou d’autres produits dérivés : le Centre Pompidou-Metz, c’est bientôt !

Le  site du Centre Pompidou-Metz c'est par là: http://www.centrepompidou-metz.fr/site/?-chefs-d-oeuvre,911--

Restaurant La Voile Blanche

Prolongeant l’expérience de la découverte artistique, le restaurant La Voile Blanche propose aux visiteurs une halte gastronomique dans un décor élégant. Les architectes Patrick Jouin et Sanjit Manku ont conçu un espace inspiré du kaléidoscope composé notamment de panneaux de verre affûté. Ce théâtre d’illusions jouant sur les reflets et la perception des images est contrebalancé par les formes souples des fauteuils composés de deux pétales.
C’est dans cet espace inspiré, composé d’une salle de restaurant, d’un bar et de deux terrasses, qu’officie Jean-Marie Visilit. Le chef de la Grange de Condé, établissement renommé situé à une vingtaine de kilomètres de Metz, a choisi d’ajouter des touches contemporaines à une cuisine régionale de marché. Les formules s’adaptent à toutes les faims : repas d’affaires, déjeuner avant ou après une visite, repas sur le pouce, salon de thé, bar chic.

Tous les jours de 11 h à 22 h 30, sauf le mardi (jour de fermeture) et le dimanche, brunch de 10h à 18h

Bar 333

Restauration rapide et bar. Le 333 propose petit-déjeuner, apéritif et restauration légère de 11h à 18h, puis bar du soir jusqu’à la fermeture. Le bar ferme ses portes au départ des derniers clients.

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Dans le même temps ou presque, dans le champ de la relation aux expériences et du culte de l’art, on assiste à la rationalisation, à la standardisation et à la transformation de l’expérience esthétique en produit culturel accessible et calibré. […] Ici se consomme, à tous les sens du terme « consommer », une production industrielle des œuvres et des expériences qui aboutit, elle aussi, à la disparition de l’œuvre.

Yves Michaud,

L’art à l’état gazeux, Essai sur le triomphe de l’esthétique,

Hachette Littératures, Editions Stock, 2003.

Page 12.


[1] Ce qui se traduit et se manifeste au grand jour dans le développement puis l’inflation du nombre des musées et leur transformation en temples commerciaux de l’art – malls de l’art.

Yves Michaud, L’art à l’état gazeux, essai sur le triomphe de l’esthétique.

7 mai 2010

L'oeuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique (dernière 1936)

v2secteurc11« On s'était dépensé en vaines subtilités pour décider si la photographie était ou non un art, mais on ne s’était pas demandé d’abord si cette invention même ne transformait pas le caractère général de l’art […] »

En effet, depuis ces trente dernières années apparaît une nouvelle forme de la photographie. Cette dernière est alors utilisée pour ses qualités plastiques et ne résulte plus uniquement du travail du photographe ou du photoreporter. Grâce à l’innovation technologique, par le biais de la photographie numérique, des artistes comme Alain Bublex nous livrent un travail au caractère nouveau. Au travers de ces images émerge un univers de science-fiction. Le paysage urbain est appauvri de sa singularité pour devenir un espace privatisé sous l’égérie de grandes marques. Le travail de Bublex amène le spectateur à (se) questionner le monde capitaliste dans lequel nous vivons. La saturation de l’espace urbain procure un sentiment d’enfermement, d’étouffement qui amène aussi à s’interroger sur la déshumanisation provoquée par la reproductibilité. 

A. Bublex, Plan voisin de Paris - V2 circulaire secteur C11, 2004.

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